Réflexion sur la semaine de 32 heures

La semaine de 4 jours chez Spektrum n’a pas grand-chose à voir avec celle de Google. On se fait souvent demander « vous faites quoi le vendredi, d’abord? ». Parlons de notre réflexion derrière le choix de demander aux employés de faire 32 heures sur 40 hebdomadairement.
L’aspect management
Les gestionnaires le savent : il est difficile d’organiser le travail d’une équipe dans un contexte où les nouveaux projets arrivent perpétuellement, tandis que d’autres se terminent et que certains se rallongent. Et je ne vous parle pas des imprévus! On peut entamer sa semaine avec la meilleure planification, mais la réalité va toujours nous rattraper. C’est impossible d’anticiper les surprises. La théorie de management derrière le principe des 4 jours semaine se base sur une période tampon pour absorber ces imprévus. C’est comme l’analogie de la coupe de Pythagore : quand la coupe est trop remplie, elle se bouche. L’idée, c’est d’avoir un bon débit d’entrée pour pouvoir savourer le contenu du verre!

Notre dernière journée de la semaine sert donc à gérer les débordements d’un horaire réaliste pour une équipe. Ainsi, on évite de se mettre de la pression pour trop en faire et jongler avec les horaires en exigeant des heures supplémentaires.
Choix financiers difficiles
Si on planifie 32 heures de travail sur 40 dans une semaine, ça signifie 20 % d’heures de moins à facturer. C’est-à-dire que 20 % des marges de profit représentent le coût à prévoir pour maintenir un horaire de travail de 4 jours semaine. Selon l’industrie et les marges de chaque entreprise, ce pourcentage peut avoir l’air effrayant. Et il l’est! Il s’agit d’une décision d’affaires et de saine gestion qui, comme toute bonne chose, vient avec un prix à payer. De notre côté, nous avons appliqué ce principe dès la fondation de Spektrum, il y a bientôt 10 ans. Notre structure de coûts est basée sur cette aspiration qui est devenue réalité.
En bref, c’est clairement un système qui amène des coûts significatifs, mais qui en vaut la peine pour assurer une saine gestion des clients, des projets et surtout, de l’équipe.
Innover, oui, mais pas au détriment du client
Les clients qui mandatent Spektrum le font nécessairement en raison de notre expertise. Si tout le monde travaillait 40 heures facturables par semaine, à quel moment l’équipe pourrait-elle renouveler ses connaissances, expérimenter des nouvelles pratiques et technologies ou optimiser nos façons de faire? Tout ça ne devrait pas se faire au détriment d’un client, qui nous mandate non pas pour apprendre, mais pour livrer ce qu’on sait faire. Si on reprend l’exemple des 40 heures, l’idée y étant rattachée est que les employés devraient innover et expérimenter sur leur temps personnel, tout en en faisant bénéficier l’entreprise. Ce n’est pas très juste, non?
Le but du 20 % d’innovation est donc de permettre à l’équipe d’avoir un temps de réflexion pour essayer de nouvelles choses dans le cadre de leur travail et dans un contexte professionnel. Parfois, ça donne naissance à de nouveaux produits ou startups à l’interne!
À chacun sa formule, mais pour nous, c’est ce qui nous permet après 10 ans de continuer à innover et à améliorer ce qu’on fait, en toute transparence. Le client bénéficie donc de chaque heure passée sur son projet, mais aussi de notre désir d’amélioration continue qui se concrétise à travers notre fameux 20 %.
Un rythme humain
L’idée des 4 jours semaine vient aussi de l’aspect humain qui est fondamental à notre culture d'entreprise. Nous partons du principe qu’il est impossible pour un humain de travailler 8 heures de façon efficace dans une journée. Notre travail est intellectuel : « être focus » plusieurs heures consécutives est excessivement difficile. Jour après jour, c’est simplement impossible! À quoi bon se forcer à rester devant l’écran, si nous ne sommes pas efficaces et produisons des projets qui ne sont pas à la hauteur? 32 heures, c’est l’idéal pour produire de la qualité à un rythme soutenu et surtout, soutenable pour l’humain.

Au quotidien, la planification de 32 heures permet aux gens de ne pas avoir à manger devant l’ordi, d’aller à un suivi de grossesse prévu un mardi à 10h30, de sortir courir deux heures un midi ensoleillé, d’aller faire de la slackline au parc Victoria parce qu’il fait gros soleil, ou même de partir plus tôt le vendredi pour leur long weekend en camping et éviter les bouchons de circulation. Cette flexibilité-là, elle ne peut pas être planifiée.
Attentes VS réalité
Des imprévus, il y en aura toujours. La réalité, c’est qu’il arrive que l’équipe doive travailler 40 heures. Des fois, ça déborde ou il y a des urgences et il faut mettre les bouchées doubles. Par contre, la différence, c’est que quand ça arrive, ce n’est pas du temps supplémentaire. C’est une situation momentanée qui est une exception dans notre culture d’entreprise.
À quoi ressemble un vendredi chez Spektrum? Normalement, il y a des employés qui travaillent le matin, comme presque chaque jour, dans l’objectif de finir leur semaine de 4 jours (parce que rappelez-vous : travailler 8 heures de façon efficace est inhumain). Souvent, c’est à ce moment-là que l’équipe termine sa semaine. À midi, on dîne tous ensemble et on revient au bureau vers 14 h, où la semaine de travail est généralement terminée « pour vrai ».

En pratique, le 20 % de temps non facturable et non planifié n’est pas isolé au vendredi. Ce sont des heures par-ci, par-là, au courant de la semaine, pour se donner une cadence durable et humaine. Il s’agit surtout de moments pour permettre à l’équipe de respirer et permettre à Spektrum d’offrir la meilleure efficacité durant chaque heure investie. Bref, c’est une formule gagnante pour tout le monde, qui, oui, amène des coûts. Quel prix êtes-vous prêts à mettre sur la qualité du travail et de votre emploi?
Photos : Elias Djemil